Nouveau tatouage pour quelqu'un d'anormal

La journée avait bien commencé, j'avais placé à l'extérieur le tatouage flash du jour, une tête d'aigle avec une petite rose dans le bec. Tous les jours, je change, tout les jours je laisse ma main décider ce qu'allait être le tatouage du jour. J'aime mon boulot et je n'en changerai pour rien au monde. Je regarde mon téléphone, pas de message de la grande, donc c'est que l'école se passe bien, pas ne news des deux petites et pas de messages de mes soeurs, leurs mères. Donc je peux vaquer à mes occupations tranquillement. Aujourd'hui, j'ai l'employée qui est là pour m'aider avec la gestion du salon. Je ne peux pas être en même temps avec un dermographe et au téléphone. Le dernier client part, je viens de terminer son tatouage, l'empreinte de pied de son gamin. Je me souviens quand Peyton est née, j'ai failli demander à l'un de mes confrères de me tatouer l'empreinte de son pied aussi, mais on ne trouvait plus vraiment d'endroit pour le mettre, j'ai du renoncer. Bref, je vais pour aller me servir un café, quand une personne entre.

"Bonjour, j'aimerais un nouveau tatouage mais je n'ai pas d'idée particulière."

- Bonjour... Je souris en tendant la main pour le saluer. Si vous êtes sur de vouloir un tatouage, c'est ce qui compte, on va chercher ensemble. Je lui indique les sièges, juste à côté et je m'assois en face de lui, un bloc de dessins sur mes genoux. Est-ce que vous avez une petite idée de l'endroit, de la couleur, du style, de la taille et de ce que vous aimeriez représenter? S'il ne sait pas trop, je lui indique un classeur où j'ai rangé les photos de toutes celles et ceux que j'ai tatoué. Il y a plein de style, de motif différents... si vous voulez un peu d'inspiration, je peux vous laisser regarder le classeur quelques instants. Vous voulez un café, ou autre chose?

Nouveau tatouage pour quelqu'un d'anormal

Bon, alors, il n'en était pas à son premier tatouage, c'est déjà ça. Il en veut un nouveau, ok, pas de problème. Un qui lui corresponde vraiment. Je hoche la tête. En effet, il faut souvent une longue réflexion pour trouver vraiment le tatouage qui signifie quelque chose et qu'on veut arborer fièrement. Pas un grand. Pas un petit. Pas de couleur, donc noir et gris. Ca me va. Sur l'épaule ou le torse, on pouvait donc faire tous les styles de tatouages et tous les motifs, ces deux zones étaient relativement plates, il n'y avait pas de problème. Elles ne sont pas non plus extrêmement sensibles, donc on pouvait faire du détail et de belles lignes droites. Je le laisse farfouiller dans le classeur alors que je lui propose une boisson.

- Je reviens.

Je me lève et vais me chercher une tasse. J'en verse une également au potentiel client avant de revenir. Il a dit sans sucre, alors je n'ai rien ajouté. Je reviens me poser en face de lui. Il me montra un dessin scandinave, relevant plus du symbole que d'un véritable dessin. Une rune nordique pourrait-on dire. Je hoche la tête à sa demande. Bien sur que l'on peut combiner tout ce que l'on veut. J'adorais ce tatouage, il était l'un de mes préférés. Il veut ajouter quelque chose qui évoque la renaissance. Quand j'avais fait des recherches sur Vegvisir pour cette commande, je ne me rappelais pas d'avoir lu quelque chose sur la renaissance du monde. Juste que... y'a l'Appocalypse (à la mode scandinave) et après, y'a les gens bons qui vivent dans un hall doré. Mais de là à dire qu'il y a un symbole qui montre la renaissance? Hmm...

Il faudrait chercher sur internet s'il y a un symbole scandinave pour la renaissance, sinon, on peut ajouter un arbre ou un animal? Je réfléchis encore un peu, imaginant divers dessins possibles. Laissez-moi quelques instants... Je commence à griffonner comme un dératé sur le papier. Ce sont juste des esquisses, pour lui donner des idées, ce ne sera pas le dessin final, bien entendu. Tout en dessinant, j'écoute ses demandes et tente d'adapter mes dessins. Puis après de longues minutes, je retourne le carnet et le lui tends pour qu'il puisse me dire si l'un des dessins ou non, lui plait. Je commente en même temps pour expliquer les choix stylistiques que j'ai fait. Celui-là irait bien sur le torse avec la tête du loup qui par vers l'épaule, niveau visuel, il donnera cet effet d'élévation... Celui-là reste classique, avec un arbre tout simple. Mais un arbre où les oiseaux reviennent, donc une sorte de renouveau... Un peu le même, mais avec un autre style, peut-être un peu plus celtique... Et là, j'ai mis des loups à la place des oiseaux. Le loup étant un animal sage et fort...

Dessin n°1 Dessin n°2 Dessin n°3 Dessin n°4

Nouveau tatouage pour quelqu'un d'anormal

Je ne m'insurge pas quand il dit qu'il n'aime pas. Après tout, c'est lui le client, il fait ce qu'il veut. Et puis, ce n'était que des idées comme ça, rien de bien méchant. Mais au moins, on avance, on sait ce qu'il ne veut pas. Reste à trouver ce qu'il veut. Pendant que je gribouillais, il a cherché un peu ce qui pourrait lui faire plaisir. Ah oui, l'Ouroboros! pourquoi je n'y avais pas pensé avant. Je hoche la tête lui faisant comprendre que je connaissais ce mythe et que en effet, ça pourrait bien coller avec le vegvisir. Je reprends mon calepin et gribouille à nouveau dedans. Le phoenix aussi, ça pouvait marcher. D'ailleurs, c'est ce que je ne tarde pas à lui montrer après avoir de nouveau tendu le carnet. Je profite d'avoir les mains libres pour prendre quelques gorgées de café.

- Le premier, très simple, peut-être trop, mais c'est pour vous montrer jusqu'où on peut aller dans le simple par rapport au deuxième, plus complexe, mieux détaillé. On peut bien sur faire un mélange des deux, changer le sens. Ce genre de tatouage va très bien sur le torse, au niveau des pecs, car il suit naturellement les courbes du corps. Après tout, de ce que je pouvais deviner, il avait l'air plutôt bien bâti. Donc ça ferait vraiment chouette. Et puis voilà, un avec un phoenix. J'ai pas détaillé l'oiseau, mais on peut le faire, pas de soucy. Je peux le dessiner au dessus du Vegvisir également, on peut enlever ou ajouter des détails.

Dessin n°1 Dessin n°2 Dessin n°3

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Je souris, parce qu'on est proche de trouver ce qu'il cherche et j'aime faire plaisir aux gens. Je hoche du chef quand il dit qu'il aime beaucoup le premier, donc moins de détail, plus stylisé, ça me va. Et il annonce qu'il est face à un dilemne. C'est que j'ai réussi alors. S'il aime les deux dessins, c'est qu'il hésite.

- Faut faire attention, parce qu'on tombe vite sous l'influence du démon du tatouage. On en fait un et on l'aime tellement qu'on en veut un autre. Je souris encore plus. Je hoche du chef une fois de plus lorsqu'il me rend mon carnet. C'est partit pour de nouveaux gribouillages rapide, cette fois, uniquement avec un phoenix et le vegvisir. Je regarde mon travail après quelques minutes, je ne pense pas que le premier va lui plaire, je me suis laissé emporté dans les détails, mais bon, on peut le simplifier. Je lui propose alors trois nouveaux dessins. Encore une fois, j'ai un peu détaillé, mais c'est modifiable. Le premier, le phoenix prend vraiment son envol. Le deuxième, le phoenix est en dessous, il a l'air de porter le vegvisir. Quant au dernier, j'ai fait en sorte que l'oiseau vole vers le vegvisir, l'oiseau est modifiable parce que là, il ressemble plus à un corbeau qu'autre chose, mais voilà, c'est pour vous donner une idée.

Dessin n°1
Dessin n°2
Dessin n°3

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Je souris, une fois de plus, au compliment. Pourtant, ce ne sont que des dessins tracés rapidement sur un bout de papier, ce n'est pas encore du très appliqué. Mais je suis content que ça lui plaise, car au moins, c'est le résultat des études et du mal que j'ai eu pour accomplir ces années de galère. Alors oui, ça me fait très plaisir qu'il me le dise. Je hoche la tête quand il m'indique qu'il préfère le troisième. On a qu'à modifier l'oiseau, pas de soucis. Il faut que j'arrive à visualiser un phoenix. Cela ne sera pas chose facile car il le veut en noir et gris et qu'un phoenix, c'est plutôt jaune et rouge, comme le feu. C'est à ça qu'on le reconnait. Mais ce n'est pas impossible. Il me tend son avant-bras et j'observe le tatouage qu'il a déjà. Ah, le tracé est remarquable, le noeud est magnifique. Je redresse les yeux.

- Donc vous voulez deux tatouages...  Je réfléchis un instant. Pour ce qui est de l'Ouroboros, on peut le dessiner autour de votre poignet et non pas autour du noeud. Un peu comme un bracelet si vous préferez. L'Ouroboros ne sera pas loin de votre noeud, mais ne le séparera pas de sa moitié. Je reprends mes dessins. Il faut que je trouve un truc pour le phoenix en attendant. Hmm... Il faut que j'arrive à représenter un phoenix, vu du dessus, les ailes écartées et... Oh, mais je sais. J'en ai déjà fait un... Où est-ce qu'il est celui-là? Je me lève et farfouille dans un autre classeur, un plus ancien, quand j'étais encore dans le salon précédent. J'ai déjà fait un phoenix comme vous me le demandez, attendez... Ah, le voilà! Et je lui tends le classeur pour qu'il puisse voir le tatouage. On enlève les décors, on place le Vegvisir au dessus... Oh, mais attends, j'en ai un autre. J'ai celui-là, aussi. Je tourne trois pages et indique un deuxième tatouage Il est différent dans le style, mais il irait mieux avec le Vegvisir. Je vais chercher un ultime classeur avec des dessins que j'ai fait de phoenix en tout genre. Si vous voulez des phoenix stylisés, j'ai ceux-là qui pourraient convenir. Le premier est l'un des plus minimalistes que je peux faire et qui fasse penser à un phoenix. Le deuxième est très différent, mais qui pourrait correspondre au style du tatouage qu'il désire. Celui-ci est un phoenix de glace, mais on peut adoucir les plumes pour les rendre plus... courbes, pour que cela ressemble à du feu et non de la glace.

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Bien, on avançait vraiment bien! Je hoche la tête, oui, après tout, le client était roi, s'il veut la tête à un endroit précis, je ne peux lui dire non et en effet, ça fera un véritable effet bracelet. Quand il me donne ses impressions sur la suite, je m'assois de nouveau dans le canapé en face de lui et reprends mon dessin, cette fois, je le fais plus rafiné, ajoutant tous les détails qu'il m'a donné. Le Vegvisir assez détaillé, l'oiseau en dessus en cassant les lignes droites, en les faisant plus aérienne, éthérées, il faut que cela ressemble à un oiseau de feu et non de glace. Mon dessin prend toute la page, mais je veux qu'il soit le plus précis possible pour pouvoir aller chercher dans le détail. Puis, je le regarde un moment de loin, ajoute encore les derniers traits que je juste nécessaires à la composition du dessin et ce n'est que lorsqu'il me plait le plus, que je le donne à ce client en attendant son avis retour.

- Si cela vous convient, il n'y a plus qu'à me dire où vous le voulez. Et parler de la taille, de l'emplacement et de la douloureuse.

La douloureuse étant le prix des deux tatouages. Dans ma tête ça calculait vite non seulement pour le prix des tatouages, mais également pour le temps qu'ils allaient me couter. Je bus une bonne rasade de café, le temps que le client se décide.

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Je souris, très honnoré et satisfait que mon dessin lui plaise. J'avais travaillé dur pour avoir ce fichu diplome et mes soeurs m'avaient toujours dit que j'avais un don pour le dessin. Bon, au moins, je pense que ce dessin sera parfait pour lui. Il a l'air d'y tenir beaucoup. Les coudes sur les genoux, je me penche un peu dans sa direction.

- C'est le passage sur les os qui est le plus douloureux. Là où il n'y a pas beaucoup de chair, les vibrations du dermographe sont plus... lancinantes. Le plus douloureux, c'est la tête, les côtes et tout ce qui est articulation... sans parler des endroits où la peau est la plus fine. Je laisse quelques secondes de blanc pour le laisser décider d'où il veut le tatouage. Le tatouage est plutot linéaire donc on peut le mettre au centre du torse, sur un pec, au niveau du ventre... partout où vous voulez, si vous voulez garder une symétrie ou non. Après si vous ne le voulez pas trop grand, sur un bras, il sera parfait. Je veux vérifier mes calculs alors je sors mon téléphone et pianote dedans. Quand à chiffrer, l'Ouroboros coutera 150$. Le phoenix avec le vegvisir... Je pianote encore. 250 dans sa petite forme à 350 si vous le voulez un peu plus grand. Et si vous les laissez en noir et gris. Je regarde à nouveau les dessins. L'Ouroboros va me prendre une heure environ... L'autre... Je dirais au moins 2.

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- C'est pas non plus une torture abominable, hein.

Je souris. Ca picote, ça peut en effet faire mal si ça tombe juste à côté de l'os, mais c'est pas non plus catastrophique. Toutefois, je le laisse réfléchir, c'est lui le client après tout. Je me redresse, range les différents classeurs aux différents endroits. Maintenant qu'on a le futur tatouage, on a plus besoin de ça. Et je sais qu'à 16h, je récupère Peyton, donc il lui faudra un coin de table pour dessiner à son tour. Je sais déjà qu'elle proposera un dessin avec une licorne au client que j'aurai à ce moment-là. D'ailleurs, il y a les dessins de Peyton accrochés dans un petit coin discret de la salle d'attente. Ce ne sont que des bonhommes batons et des licornes avec de droles de corps et un fort embonpoints, mais ça reste des dessins de Peyton, je ne peux pas les retirer. Je hoche la tête quand il demande si on peut voir ce que cela donnerait sur son torse. Mais avant de le faire bouger dans le box de tatouage pour imprimer le stencil, je regarde l'agenda et je tourne les pages.

- Hmm... Une séance d'au moins trois heures, j'ai jeudi dans deux semaines, à 14h... après, je suis plein jusqu'au mois de novembre... Sinon, aujourd'hui, je ne pourrais vous en faire qu'un, surtout si on doit redimmensionner celui du torse. Et du coup, pour l'autre... demain 10h ou 15h... ou après demain 18h.

Je l'invite à me suivre jusqu'à mon box. Y'a une grande photo d'un tatouage en couleur, sur le dos. C'est ce tatouage qui m'a fait gagner la final de Ink Master. C'est l'un de mes préférés. Je l'invite à s'assoir le temps que je bidouille la machine, il faut que je copie le dessin que j'ai fait et la machine imprimera un stencil directement à appliquer. Il ne faut que quelques minutes, j'en ai sorti deux, de tailles différentes. Je me tourne vers le client.

- Vous pouvez retirer votre chemise, je vais vous montrer ce que ça donne. Ne vous inquiétez pas pour les trucs superflus, la machine imprime toujours des choses qui n'ont pas lieu d'être, une fois tatoué, ça sera bien plus clair, je veux dire au niveau de la visibilité et de la lisibilité du tatouage.

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Comme ça, ça me prend les deux heures de libre aujourd'hui, avant mon rendez-vous prévu. Demain, pareil, j'avais un peu de temps libre, ça le comble. J'aime bien avoir un emploi du temps bien rempli. Je note dans l'agenda. En général, je note les tatouages que je fais, et non les identités des clients. Je me souviens des tatouages, pas des noms. C'est plus pratique pour moi.

- C'est noté, c'est tout bon pour moi. On devra se revoir la semaine prochaine, juste pour vérifier la cicatrisation, mais ça ne prendra pas longtemps, donc vous pourrez repasser sans rendez-vous.

Je le guide jusqu'à mon box. Au Linked, je veux que les tatoueurs invités se sentent comme chez eux, alors j'ai aménagé les deux autres box de manière très sorbre et lorsque j'emploie un tatoueur, il peut le décorer comme il veut. Moi, j'ai pris le parti d'afficher le tatouage de la final d'Ink Master, c'est bien sur mon travail et j'ai réussi à gagner avec celui-là. Il me rend très fier et c'est grace à ce tatouage que j'ai gagné les 100 000$, j'ai pu aider mes soeurs. Ce n'est peut-être pas celui que je préfère, parce que le style est pas forcément le mien, mais c'est l'une de mes plus belles réussites. Et quand il me demande pour la photo, je hoche la tête, fier de mon travail.

- C'est ce tatouage qui m'a fait gagner la compétition. Y'a 36h de boulot.

Non loin de là, d'ailleurs, il y a un diplome encadré, indiquant la saison de l'émission et le fait que j'en ai été le vainqueur. Ce n'est pas une émission très connue, mis à part pour les grands amateurs de tatouages. J'enfile des gants. Quand le stencil est prêt, je me tourne vers l'homme et place le stencil sur sa peau. Puis délicatement, je retire le papier et l'encre violette reste sur la peau. Immédiatement, je vois les traits en plus qui n'ont pas lieu d'être, mais ce n'est pas grave, je sais ce que je dois tatouer. Je vérifie qu'il soit à la bonne taille. Hmm... Celui-là est peut-être un peu grand.

- Pour respecter les proportions, je le ferai un chouillat plus petit.

Je lui montre d'ailleurs, la taille que le tatouage ne devrait pas dépasser à mon avis en posant mes doigts sur son torse.

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- Oui, oui, pas de soucis. S'il y a un ajustement ou un remplissage, on prendra alors rendez-vous et ça ne prendra pas longtemps.

Bien, allons dans mon box. Il y a d'autres cadres et montrent mon travail sur plusieurs années, mais j'avoue que celui-là... Pourtant, ce n'était pas mon premier dos que je tatouais en entier. Je souris quand je vois sa tête alors que je prononce le nombre d'heures nécessaires. En temps ordinaires, si cela avait été fait à mon salon, je pense que cela m'aurait pris plutot autour de 40 heures. Pour la compétition, il y avait un autre challenge, c'était de faire vite et bien. Nous n'avions que 36H et je peux vous dire que j'ai utilisé chaque seconde accordée. C'était même limite à la fin. Mais ça va, je n'ai pas baclé le travail. Il n'y avait que quelques rares retouches à faire, j'étais extrêmement content de mon travail.

Bien, j'applique donc le stencil sur sa peau et déjà l'artiste dans ma tête dit qu'il faut le faire plus petit. Donc on est parti pour plus petit? Juste un peu... Peut-être 2 centimètres. Ca correspondra mieux. Alors je reviens au plan de travail et reprends le dessin, ne changeant rien, mais le reproduisant avec beaucoup plus de précision, y ajoutant des traits dans l'oiseau pour me donner des points de repères. Bien entendu, ceux-là, je ne les tatouerais pas, mais ça va me donner une idée des ombrages à faire. Je souris alors qu'il a déjà hate. Ca y est, un mordu du tatouage.

- Ca fait 13 ans que je tatoue. Et ça fait depuis... 2016 que j'ai ouvert ce salon.

Je redessine encore un peu avant de contempler la version finale. Ah oui, là, ça me plait vraiment. Je montre le dessin fini à l'homme. Le phoenix avait l'air de s'envoler vraiment vers les cieux vers le Vegvisir. Je pose le papier dans la machine et j'appuie sur le bouton pour qu'elle me l'imprime à la taille désirée. Pendant ce temps, je prends de quoi nettoyer la zone. Je passe un coup de rasoir pour être sur qu'aucun obstacle m'empèchera de tatouer. Puis quand la machine bippe, je sors le stencil et m'apprête à l'appliquer sur la peau.

- Mettez-vous debout, les bras détendus, les épaules relachées...

Je veux que la pose dès le départ soit parfaite. Vu la simétricalité du tatouage, il faut que cela soit parfaitement au bon endroit. Attention, voilà! Je retire le papier pour qu'il n'y ai plus que l'encre violette. Parfait. Ah oui, je suis content de moi. Je le laisse regarder dans le miroir, après tout, le client est roi. Et si c'est tout bon, je le laisse s'assoir dans le fauteuil qui comme celui d'un dentiste peut se plier dans toutes les position. J'opte pour une position semi alongée, ça sera plus facile de travailler et lui de supporter. Le torse sera incliné, mais pas trop, la peau tirée, mais pas trop. Je m'attache les cheveux, dans un gros chignon avant de préparer les couleurs, enfin, le noir et le blanc qui pour moi sont bien des couleurs.

- Si vous êtes prêt, on peut y aller? Je souris avant de tendre la main droite pour serrer la sienne. Au fait, je m'appelle Leo.

Je récupère un tabouret à roulette et je descends le fauteuil pour qu'il soit à la bonne hauteur. Voilà, comme ça, je peux me pencher seulement légèrement au dessus de lui, j'aurai pas à forcer sur les reins. Et puis je mets en route le dermographe pour absorber un peu d'encre noire.

Nouveau tatouage pour quelqu'un d'anormal

- Merci, c'est gentil.

Mes soeurs m'ont toujours dit que j'avais un don dans les mains, mais ce n'est pas très objectif, après tout, elles sont mes soeurs. Et puis j'ai bien travaillé à l'école aussi. Je ne me sens pas le meilleur dessinateur ou tatoueur de tous les temps, même si c'est ce qu'elles me rabachent tout le temps, mais je pense qu'en effet, j'ai un bon coup de patte. C'est vrai que j'arrive à reproduire pas mal de style et que le dessin, les formes, la trois-dimension, c'est... "facile" pour moi. Les dessins dans ma tête et sur le papier, sont toujours similaires, j'arrive à reproduire exactement ce que j'ai envie de dessiner. Je serre la main à Allen et je me prépare. Je lui offre un sourire avant de prendre un bout de sopalin.

- On peut discuter, bien entendu. Tant que vous ne bougez pas trop le torse. Je vais déjà faire le phoenix, comme ça la zone sera désensibilisée pour faire les traits droits de la boussole. Parce que là, il ne faudra plus bouger.

Je commence donc, pencher à quelques centimètres de sa peau, les aiguilles du dermographe piquant cette dernière. De temps à autre, lorsque je finis une ligne, je passe un coup d'essuie-tout pour enlever le surplus d'encre. La peau rougit légèrement, réaction totalement normale.

- Alors, qu'est-ce que vous faîtes dans la vie?

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Avec le temps, j’avais l’habitude des clients qui bougent, des clients qui ont mal. Certains sont plus douillets que d’autres. Et puis ça dépend de l’emplacement. J’ai vu des mecs tatoués de la tête au pied, pleurer à chaudes larmes parce que je tatouais le crane. J’ai vu des nanas non-tatouées qui ne bougeaient pas un muscle en se laissant faire comme si ce n’était rien du tout, à peine pire que la caresse d’une plume. Donc ça ne me surprendrait pas qu’il bouge un peu, et puis si on parle, naturellement son torse bougera. On verra quand il s’agira des lignes bien droites de la boussole. De toutes manières, je serai concentré plus que de raison, donc ça m’étonnerait que je parle.

- Je ne perds jamais mon temps à tatouer quelqu’un. On peut toujours reprendre un tatouage, vous inquiétez pas, mais ça peut changer un tantinet le dessin.

Je commence à tatouer tranquillement. Je n’aime pas trop me presser. Qui dit se presser, dit un peu bacler, alors non, je fais attention et comme j’aime ce que je fais, j’y prends encore plus de plaisir. Ici, ce n’est pas comme dans l’émission, j’ai tout mon temps et je veux toujours que mes tatouages soient les plus réussis possibles. Il dit être dans les forces de l’ordre. Ouah ! Police, hein. Chouette. J’aurai jamais osé. Je n’aurai pas pu de toutes manières, avec mes sœurs à prendre soin.

- J’ai toujours bien dessiné et j’ai toujours voulu des tatouages. Donc c’était tout tracé pour moi. Je me suis lancé là-dedans parce qu’on m’y a incité, parce que je le voulais et parce que j’aimais ça. J’ai passé mon diplôme. J’ai trouvé un job dans un salon. Le gérant m’a dit que j’avais des chances de gagner à une émission. J’y suis allé pour la récompense surtout, j’avoue, pas pour me mesurer aux plus forts. Je souris. Je suis très fier de mon parcours. J’ai réussi à subvenir aux besoins de ma famille et tout de même travailler dans le milieu que je voulais. Et vous, la Police, comment vous en êtes arrivés là ?